Mes expériences d’athlète, d’entraineur et de conseiller running m’ont poussé à développer mes connaissances et à me poser des questions sur les arguments du marketing et les croyances les plus répandues. Ce qui semble aujourd’hui normal aurait été impossible à admettre et à accepter il y a 20 ans.
Loin des tendances actuelles qui poussent certains à vendre en priorité les paires les plus chères, celles qui font les plus belles promesses, nous avons choisi de nous appuyer sur nos connaissances pour conseiller uniquement des modèles adaptés et qui répondent à des principes vérifiés. Nous essayons de donner les bonnes clés pour comprendre les points importants à travailler ou à éviter. Ces conseils précieux qui vous permettront de progresser sans vous blesser.
J’ai regroupé ici les croyances imposées à grands coups de marketing et de sensations de confort illusoires. Ce sont des erreurs que peu de gens remettent en question, mais qui sont assez pourtant faciles à démontrer.
Des chaussures indispensables pour battre votre record:
Tout commence par un besoin naturel et inné. L’envie de courir comme les meilleurs arrive très vite. C’est à ce moment que les publicités et les bonnes intentions se mélangent pour nous faire croire qu’en achetant la bonne chaussure, nous serons vite capables de courir comme les champions. Imiter leur foulée, leurs entrainements pour atteindre des objectifs rêvés très rapidement. Trop rapidement dans la plupart des cas. Nous le verrons plus précisément plus tard, mais les chaussures qui vous permettent de courir comme des kangourous ne vous préviennent pas que vous n’avez pas forcément les mêmes pieds et les mêmes muscles que les kangourous. Le problème c’est que pour accélérer ou augmente le rebond artificiellement mais cela entraine une foulée plus grande, plus haute et donc un « atterrissage » plus violent. Pour que ce soit supportable on augmente l’épaisseur et la mollesse. La sensation est plaisante mais les chocs se transforment en pression et en forte instabilité. On perd progressivement en sensations, en souplesse et en qualité de pieds . Pour avoir un résultat immédiat, on limite la progression et on prend des risques. Dopage technologique au dépend de l’efficacité des pieds. L’intérêt n’est pas pour le client mais pour ceux qui vendent ces produits.
La chaussure idéale pour tous, tous poids?
Bon nombre de modèles surtout sur les fiches techniques des sites internet, vous proposent des chaussures qui iront au plus grand nombre. Pourtant, part les sabots de bois, toutes les chaussures se déforment plus ou moins lors de l’impact. Etant donné que cette déformation sera proportionnelle à votre façon de courir, à votre poids, à votre vitesse (donc à la distance), des chaussures tous coureurs n’existent pas.
Pour chaque chaussure, il y a 9 critères importants qui vont influencer l’action des pieds. Les chaussures ne correspondent qu’à un certain type de coureurs. Si on change de critères cela aura une incidence sur la foulée. Il est donc important de connaitre ses besoins propres avec une analyse complète..
L’amorti vous protège?
On surfe là encore sur des croyances populaires basées sur des ressentis et sur la peur des chocs. Aucune étude indépendante n’a encore prouvé que l’amorti empêche les blessures. C’est même plutôt l’inverse. Pourtant le marketing nous pousse vers des modèles avec toujours plus de technologie, toujours plus d’amorti et toujours plus chers. Les pubs sont clairs, ne plus sentir le sol est devenu un argument. Les quelques études sur le sujets montrent que les débutants doivent commencer avec des modèles souples avec un amorti modeste et le plus possible sans renforts anti-pronation. L’amorti sera proportionnelle à votre raideur. Notre rôle est de conseiller les débutants dans ce sens, et de donner des informations aux autres pour aller très progressivement vers ces critères. Le moins possible de renforts et d’amorti en fonction de nos capacités, pour permettre aux pieds de réagir de façon optimal, le plus naturellement possible. entier le sol permet de réagir au bon moment (cf photo- vidéo complète)
Le corps s’adapte et se renforce en fonction des chocs qu’il reçoit. Il faut qu’il apprennent à maitriser et à utiliser les chocs. Ces chocs, lorsqu’ils sont maitrisés, induisent des adaptations très bénéfiques pour le corps. Surtout pour la densité osseuse ou les disques intervertébraux … Ils jouent même un rôle très important pour la mémoire (cf article à venir)
Le bon dosage et l’adaptation du corps à ces chocs bénéfiques passent par des renforcements spécifiques et parfois par un travail technique. Faire moins de bruit à l’impact, augmenter sa cadence en réduisant la taille de ses foulées ou respecter sa posture naturelle mais surtout pas par la course à l’amorti.
Car la principale erreur technique rencontrée avec des chaussures qui ont trop d’amorti, c’est la verticalisation et l’augmentation de la taille de la foulée et donc de l’impact. Elle se voit et s’entend. A chaque fois que vous vous entendez frapper le sol, c’est que le choc est trop violent pour être bénéfique. La chaussure vous donne la sensation d’être protégé mais les genoux et le dos finissent par vous rappeler à l’ordre. Beaucoup pensent alors que c’est un manque d’amorti alors que c’est justement l’inverse. L’excès d’amorti nuit à la réactivité et la stabilité.
Les chaussures maximalistes seraient plus efficaces
C’est le même principe que l’excès d’amorti mais en bien plus nocif. Les stacks (épaisseur de la semelle extérieur) très importants sont à la mode. Chacun pense que plus on a un stack important plus on a un amorti important et donc plus on est protégé. On vient d’expliqué que c »est exactement l’inverse. Nous avons vu précédemment pourquoi l’amorti (absorption des chocs) n’est pas si bon que ça. Mais lorsque l’on ajoute de l’épaisseur, on ajoute de la déformation et de la compression de la semelle. Or, des études ont prouvé que le corps cherche avant tout à garder une raideur globale constante. En d’autres mots, si votre chaussure est molle votre pied sera plus raide. Moins de mouvement de la voute, les muscles intrinsèques du pied s’enraidissent.
Comme lorsque l’on rebondit sur un trampoline. Le corps ne gère plus un impact net mais une oscillation, une pression. Le corps doit se raidir pour subir la déformation du trampoline. C’est exactement le même phénomène de compensation au niveau du pied. Avec un modèle qui se déforme beaucoup (épais ou à air ou très mou ) le pied perd alors rapidement ses qualités d’élasticité. et de proprioception Avec l’apparition des douleurs et pathologies liés à des pieds raides comme des briques (aponévrosites, épines calcanéennes…) , le kiné vous conseillera sans doute de l’assouplir en faisant rouler une balle de tennis sous votre voute plantaire. Nous vous conseillons très souvent de faire de la corde à sauter pieds nus et de renforcer votre LFH (long fléchisseur de l’Hallux (pouce du pied) avec des exercices de griffer (serviette…). Mais plus simplement, il suffit de choisir un modèle qui ne se déforme pas trop pour éviter tous ces soucis.
Plus la chaussure est épaisse plus elle se déforme à l’écrasement. Il y a 2 conséquences biomécaniques directes: Perte de stabilité et augmentation de la réaction verticale du pied. Les chaussures se déforment et s’usent très vite mais les utilisateurs sont content de croire qu’ils ont une foulée plus naturelle. Ils sentent plus vos mollets travailler car le pied se défend en poussant vers le haut. L’usure des talons et la déformation ne laissent pourtant aucun doute sur les risques de fourmillement, d’ampoules et de blessures comme les périostites tibiales.
Analyser une foulée en déterminant simplement que vous êtes pronateur ou supinateur
Tout le monde croit pouvoir déterminer sa foulée en se disant universel, pronateur ou supinateur. C’est un raccourci qui est important mais loin d’être suffisant pour choisir son modèle. Certains sites évitent même le problème en parlant de « stabilité » pour éviter de parler d’un renfort anti-pronation. On ne voudrait pas vous effrayer en vous disant que vous n’êtes pas parfait!
Nous avons vu dans un article dédié qu’il est important de comprendre quelles sont ses préférences motrices pour savoir quel type de modèle choisir. Si cette analyse basique suffisait pour éviter les blessures, elles devraient donc avoir disparu depuis un moment.
C’est tellement plus simple d’écouler les stocks en ligne sans tester réellement ses besoins. Il faut donc vous laisser croire qu’il est inutile de vous regarder courir. C’est pourtant indispensable pour comprendre si votre pronation est naturelle ou provoquée par un défaut de stabilité ou conflit entre votre façon naturelle de bouger et votre impact au sol. Chaussures trop molles, manque de gainage, manque de force dans les pieds, de nombreux indicateurs expliquent la pronation ou la supination. Il vaut mieux corriger ces quelques points plutôt que de mettre un renfort. Bloquer une réaction du pied sans corriger la cause de cette réaction risque surtout de transférer le problème au genou. Nous ne sommes pas né pour porter des chaussures. Il faut donc toujours limiter leur action au strict nécessaire.
Il existerait une foulée idéale
C’est un mythe qui n’a pas été créé par le marketing des grandes marques mais par des erreurs de terrain. Certaines marques s’y engouffrent aujourd’hui pour vendre des modèles à plaque ou venter des effets de rebonds. C’est une grande erreur que Volodalen nous explique parfaitement dans cette vidéo.
Alors non! la meilleure foulée n’est pas celle de l’attaque médio-pied. Les études se multiplient pour prouver qu’il y a 2 grandes familles de coureurs et 5 types de courses référencées. Les terriens beaucoup plus nombreux en courses longues distances, et les coureurs dits aériens. Les terriens attaquent le sol avec le pied en avant de leur centre de gravité; donc le talon est le premier à toucher. Essayez de faire un triple saut en attaque médio et comprenez que le corps est armé pour dérouler le pied entièrement en commençant par le talon et pour réagir très efficacement vers l’avant.
On se retrouve aujourd’hui avec des marques qui vendent leurs produits au plus grand nombre quelque soit le résultat. Peu importe, pour eux, le nombre de blessés. C’est probablement la mode du minimalisme et les nombreux blessés qui a permis de lancer le maximalisme. Après avoir suivi le protocole strict du principal fournisseur minimaliste, une expérience a montré que 52.6% du groupe test qui était passé en minimaliste s’est blessé. Il est fort à parier que la prochaine étude relatera à peu près les mêmes chiffres chez les adeptes du maximalisme. La différence c’est qu’il faudra attendre plus longtemps car les blessures sont liées à la perte d’efficacité du pied et à l’accumulation de pression et non aux chocs instantanés. Les blessures et les effets sont très différents mais nous savons pourquoi. Les coureurs doivent garder une biomécanique irréprochable. Les terriens devront être très rasant, et les aériens devront se renforcer les métatarses et les tendons. Malheur à ceux qui ne respectent pas leurs préférences motrices.
TESTER SA FOULEE SUR TAPIS ROULANT: l’arnaque n’est pas loin
A moins d’acheter une paire pour courir uniquement sur tapis, c’est tout simplement impossible de conseiller vraiment une paire en vous la faisant essayer sur un tapis roulant.
Après tout ce que vous venez de lire, vous avez compris que pour conseiller une chaussures il y a une dizaine d’indicateurs à bien regarder pendant que vous courrez. Si ces indicateurs sont modifies par le tapis, pourquoi courir sur tapis? Le tapis permet une analyse frontale et biaisée par sa déformation donc elle seule ne suffit pas ,
Le but n’est pas de vérifier bêtement votre pronation, surtout si elle est naturelle ou créée par l’instabilité du tapis lui-même. Le but d’une analyse de foulée est de vérifier qu’il n’y a pas de conflit entre votre action au sol et votre foulée naturelle (vos préférences motrices). Est-ce possible sans bouger réellement et sans agir sur le sol? Certains « spécialistes » n’hésitent pas à le faire croire mais cette démarche est purement marketing et montre surtout un sérieux problème de formation. Le résultat se traduit de façon très nette par l’augmentation des blessures chez les coureurs
Baisser le drop permettrait de rendre la foulée plus naturelle
On lit énormément de « conseils » qui expliquent que le drop (différence d’épaisseur entre le talon et l’avant de la chaussure) vous oblige à attaquer talon et que c’est dangereux. C’est probablement la plus grosse bétise de ces dernières années et ça passe!
Presque toutes les marques se ventent d’adopter le meilleur drop. Or aucune étude ne confirme l’impact du drop sur la foulée, au contraire. Tout simplement parce que le drop n’est qu’une donnée secondaire. Sans connaitre la densité ni l’épaisseur il ne veut absolument rien dire. Nous avons écrit une article dédié à ce sujet
En gros: chaussures fines drop fin, chaussures qui s’écrasent, drop qui compense. C’est ce qu’on faisait très bien depuis des décennies mais aujourd’hui on passe pour un idiot si on réfléchit un peu trop.
Les besoins de drop ne sont pas les mêmes pour les aériens que pour les terriens,. Un coureur aérien attaque par le milieu du pied et posera le talon sous la pression du choc surtout avec la fatigue. Le drop protègera donc de l’allongement de son tendon d’Achille après l’impact. Il est prouvé depuis plus de 20 ans que le drop ne transforme pas la foulée de l’aérien en foulée terrienne. A petite vitesse, l’aérien à tendance à rester plus vertical et se permet donc d’attaquer par le talon. Le drop n’a rien à voir là dedans (cf photos), Le pied s’adapte à la posture globale du corps et non l’inverse.
Le terrien lui déroule le pied du talon vers l’hallux. Plus la déformation du talon sous l’impact est importante plus la pression vers la voute plantaire est importante. Le drop (jusqu’à 13 mm) permettra de compenser cette déformation et de passer plus facilement vers l’avant. Une chaussure fine et ferme n’a presque pas besoin de drop, par contre, une chaussure épaisse et molle aura absolument besoin d’un drop important. Si le drop n’est pas proportionné à la déformation du talon, cela provoque une pronation et une réaction verticale du pied.
Vendre un modèle uniquement en fonction de son drop est donc une énorme erreur. Le drop est un critère mais il ne sert à rien de la connaitre si on ne connait pas l’épaisseur et la densité de la chaussure. Vendre un modèle épais et à drop faible est une erreur très répandue grâce au marketing mais qui n’est pas du tout bénéfique pour les clients.
Fidèles à notre engagement, ,nous sélectionnons nos chaussures en fonction de critères précis et non en fonction des modes ou de la pression du marketing. Un modèle avec un énorme stack (grosse semelle souvent bien molle) qui se déforme facilement n’a pas sa place chez un spécialiste, surtout si le drop n’est pas proportionnel. On peut conseiller des modèles souples pour des coureurs très rigides mais il faut absolument que l’ensemble des critères pris en compte et soient équilibrés entre eux.
Eric
Coach depuis 1995
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